18/11/2025

Résidents en EHPAD en Côte-d’Or : état des lieux et enseignements à partir des données de l’Observatoire de la santé

Un recul inédit sur les profils des personnes âgées en EHPAD

L’Observatoire de la santé en Côte-d’Or propose chaque année une photographie détaillée des publics et des dynamiques de santé sur le territoire. Les données les plus récentes, concernant la situation des personnes âgées en Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes (EHPAD), sont révélatrices d’évolutions notables du “grand âge”, aussi bien sur le plan démographique, sanitaire que social. Quelles réalités recouvrent ces chiffres ?

Les EHPAD en Côte-d’Or : chiffres clés et capacités d’accueil

  • Nombre d’établissements : Fin 2023, on dénombre 128 structures EHPAD en Côte-d'Or (source : Observatoire de la santé Côte-d’Or, rapport 2023).
  • Capacité d’accueil : Ces établissements totalisent environ 9 700 places, dont plus de 95 % sont occupées en permanence.
  • Répartition géographique : Si Dijon concentre la part la plus importante (31 % des places), une quarantaine de structures sont implantées dans les territoires ruraux.
  • Part du secteur public : Les EHPAD publics représentent près de 70 % de l’offre d’hébergement, une proportion supérieure à la moyenne nationale (source : ARS Bourgogne-Franche-Comté).

Un vieillissement accentué et des entrées en EHPAD repoussées

  • Âge moyen à l’admission : Il a progressé de près de 15 mois en dix ans, atteignant aujourd’hui 85,6 ans. Près de 10 % des nouveaux résidents ont 95 ans ou plus (Observatoire de la santé Côte-d'Or, 2023).
  • Durée moyenne de séjour : Elle a diminué, passant de 3,1 ans en 2012 à 2,3 ans début 2023. Ce raccourcissement, constaté partout en France, s’explique par l’arrivée plus tardive des personnes âgées, souvent à l’issue de la perte définitive d’autonomie.

L’un des enseignements majeurs de l’Observatoire : l’entrée en EHPAD intervient désormais aussi tard que possible, traduisant la priorité donnée au maintien à domicile. Cela implique que les personnes hébergées arrivent avec une dépendance accrue.

Des niveaux de dépendance en hausse : quel profil pour les résidents ?

  • Dépendance physique (GIR) : 82 % des résidents sont classés en GIR 1 ou 2 (perte d’autonomie lourde ou très lourde), contre 59 % il y a dix ans.
  • Dépendance cognitive : Près de 65 % présentent un syndrome démentiel ou des troubles cognitifs sévères diagnostiqués (source : ARS, enquête PAERPA).
  • Poly-pathologies : 77 % des résidents cumulent au moins trois pathologies chroniques (hypertension, diabète, troubles cardiovasculaires, etc.).

Le profil majoritaire aujourd’hui : une femme de plus de 86 ans, souffrant de troubles cognitifs, dépassant les trois affections médicales, très dépendante pour les gestes de la vie courante.

La féminisation du « grand âge » en institution

  • Sexe féminin surreprésenté : Les femmes représentent 76 % des résidents d’EHPAD en Côte-d’Or (Insee, RP 2021). Cette proportion monte à 85 % au-delà de 90 ans.

Si la longévité féminine explique en partie cette situation, l’Observatoire rappelle aussi que l’isolement social est un facteur crucial dans l’admission en institution (deuil, absence de proches aidants).

Situation sociale et isolement : des enjeux majeurs

L’isolement relationnel se confirme comme une problématique : 54 % des résidents n’ont plus de partenaire de vie ni d’enfants vivant à proximité, et 41 % reçoivent moins d’une visite mensuelle (source : Observatoire de la santé, enquête EHPAD Côte-d’Or 2022).

  • Près de la moitié des admissions sont motivées par la fin d’une prise en charge familiale devenue impossible.
  • Sur 10 résidents accueillis, 3 n’ont aucune personne référente désignée pour les accompagnements médicaux ou sociaux.

Ce constat souligne l’importance de renforcer les mesures de lutte contre l’isolement, notamment via les équipes de bénévoles et de médiateurs sociaux (réseaux associatifs, Petits frères des Pauvres…).

Fragilités psychiques, souffrance morale et adaptation en établissement

  • Troubles anxieux et dépressifs : 48 % des résidents bénéficient d’un suivi psychologique ou psychiatrique, et 33 % reçoivent un traitement antidépresseur ou anxiolytique (source : Observatoire de la santé/Banque de données médico-sociales).
  • Adaptation à l’EHPAD : Près d’un tiers des personnes rencontrent des difficultés majeures dans l’adaptation lors des 3 premiers mois : repli sur soi, refus de soins, refus de l’alimentation.

Il existe de fortes disparités entre les établissements, principalement selon la présence ou non de personnel formé à la gérontopsychiatrie et d’accompagnements non-médicamenteux (ateliers de médiation, activités adaptées, présence d’animaux…).

La médicalisation accrue des structures et les enjeux de la fin de vie

  • Taux de médicalisation : En 2023, 95 % des EHPAD disposent d’un médecin coordonnateur à temps partiel et 88 % de la présence infirmière de nuit.
  • Prise en charge des soins palliatifs : Près de 60 % des décès survenus en EHPAD ont bénéficié d’un accompagnement palliatif, un taux en progression (+12 % en 5 ans).

Pour autant, le rapport note encore une inégalité d’accès aux dispositifs spécialisés (équipes mobiles de soins palliatifs, interventions psychologues) entre secteur urbain et rural.

Coût et recours à l’aide sociale : le profil socio-économique des résidents

  • Coût journalier moyen : 71 € par jour, soit un reste à charge moyen de 1 550 € par mois après aides (Conseil départemental Côte-d’Or, schéma autonomie 2022).
  • Aide sociale à l’hébergement : 38 % des résidents bénéficient d’une prise en charge partielle ou totale par l’aide sociale départementale.

Le reste à charge reste une préoccupation majeure. Par comparaison, à l’échelle nationale, cette part est d’environ 25 % (DREES, 2023), signe que la fragilité économique des familles en Côte-d’Or est particulièrement marquée.

Innovations et perspectives : vers une transformation de l’offre ?

  • Unités protégées et accueil spécifique Alzheimer : Un EHPAD sur deux en Côte-d’Or dispose désormais d’une unité spécialisée (un taux supérieur à l’ensemble des EHPAD de Bourgogne-Franche-Comté).
  • Accueil de jour et hébergement temporaire : Ces offres représentent désormais 4 % des places totales et favorisent la transition domicile/établissement et l’accompagnement des aidants.
  • Ouverture sur la vie locale : Déploiement fort des projets intergénérationnels, animations ouvertes sur les écoles et associations.

L’Observatoire souligne l’attractivité renforcée des établissements proposant des dispositifs flexibles et innovants, de même que la montée en puissance des structures “hors les murs” (offre de services et soins pour les personnes âgées vivant chez elles, adossée aux EHPAD).

Défis à venir : attractivité des métiers, financement et prévention

  • Recrutement des professionnels : Plus d’un poste sur quatre reste vacant en 2023, en particulier chez les aides-soignants et médecins coordonnateurs (source : ARS / Conseil départemental).
  • Prévention de la perte d’autonomie : Renforcement des partenariats avec les dispositifs MAIA, ESA et CLIC pour retarder l’entrée en institution et fluidifier les parcours.
  • Veille sur la maltraitance et la bientraitance : Un signalement tous les 4 jours recensé en 2023, dont 70 % concernent des négligences involontaires dues à un sous-effectif chronique.

Enjeux et leviers d’action pour la Côte-d’Or

Les prochaines années s’annoncent sous le double signe de l’augmentation du nombre de personnes âgées très dépendantes et du besoin de transformation des EHPAD. L’Observatoire insiste sur l’urgence :

  • Poursuivre la diversification de l’offre, des parcours et des solutions d’accompagnement.
  • Renforcer l’attractivité des métiers du grand âge et la montée en compétences des équipes.
  • Mieux articuler les réponses entre domicile, établissement et secteur sanitaire.
  • Mettre l’accent sur les dispositifs luttant contre l’isolement et favorisant l’ouverture de l’EHPAD sur la cité.

La Côte-d’Or s’avère un terrain d’observation privilégié, illustrant à la fois les réels progrès accomplis et les défis majeurs à relever pour penser autrement l’accompagnement du très grand âge. Les données de l’Observatoire invitent ainsi à repenser, sans attendre, le sens et les formes de la prise en charge institutionnelle dans le département.

Sources : Observatoire de la santé en Côte-d’Or, ARS Bourgogne-Franche-Comté, DREES, Insee, Conseil départemental Côte-d’Or, enquête PAERPA.

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